Fruit de 20 années de recherches et de soins de milliers de scientifiques et de médecins russes, ukrainiens et biélorusses, le livre publié à Saint Petersbourg en 2007 sous la direction de Alexei Yablokov sur « les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl pour l’homme et la nature » montre l’énormité du mensonge scientifique organisé depuis 22 ans par l’AIEA et l’OMS pour le compte des États qui se sont attribué la légitimité de posséder et d’utiliser les armes atomiques. Cet ouvrage considérable constitue la preuve scientifiquement documentée du crime de haute trahison devant l’Humanité des États membres du Conseil de sécurité de l’ONU (États-Unis, France, Grande Bretagne, Chine et Russie), et des agences des Nations Unies, qui les cautionnent par leur autorité scientifique et médicale.
Depuis l’horreur d’Hiroshima et de Nagasaki la science officielle ne reconnaissait que les effets des doses d’irradiation externe très élevées sur la santé, produits par les rayons gamma du flash de l’explosion des deux bombes. Suite à l’accident de Tchernobyl, cette vérité provisoire et incomplète s’est constituée en dogme : pour éviter une chute catastrophique de la crédibilité de l'industrie nucléaire, les institutions internationales détentrices du pouvoir scientifique dans le domaine de l’atome ont choisi d’ignorer ce que ce deuxième désastre atomique majeur, différent du précédent dans ses mécanismes et ses effets pour la santé, pouvait apporter de nouveau à la connaissance scientifique pour la sauvegarde de l'humanité.
LES ÉTAPES DE
« … Une tragédie avec des acteurs en petit nombre qui, jour après jour, décident du sort de millions de personnes. »
Yves Lenoir, « Tchernobyl, l'optimisation d'une tragédie », 1996. (Bulle Bleue, Amis de
Les 25-29 août 1986, soit quatre mois après l’explosion, l’AIEA organise la première Conférence internationale à Vienne pour analyser l’accident de Tchernobyl et ses conséquences. Les personnalités qui comptent à cette réunion sont Messieurs D.Beninson, président de
Les réunions des groupes de travail de la Conférence de Vienne ont lieu à huis clos, les journalistes n’y sont pas admis. Les discussions sont dures. La distance est trop grande entre les prévisions des Soviétiques et les chiffres que les occidentaux sont prêts à accepter. Le professeur Valéri Légassov, celui qui a survolé avec l'académicien
L’annexe 7 de 70 pages, entièrement consacrée aux problèmes médicaux et biologiques, est la pierre d’achoppement avec les occidentaux. Sans aucun chiffre de dosimétrie individuelle, ni aucune donnée biologique, les Soviétiques prévoient par calculs mathématiques abstraits un supplément de 40 000 cancers mortels pour 75 millions d’habitants de la partie européenne de l’URSS.
Tout aussi abstraitement, sans aucun chiffre de dosimétrie individuelle, ni aucune donnée biologique, les occidentaux jugent ce bilan trop élevé. Un bras de fer qui n’a strictement rien de scientifique puisque Tchernobyl est une première absolue dans l’histoire de la science et que seulement 4 mois sont passés depuis la catastrophe sans vraies recherches ni mesures cohérentes.
Le lendemain, à la conférence de presse du 26 août, D.Beninson qui présidait le groupe de travail sur les conséquences sanitaires, qualifie les chiffres soviétiques “ d’extrêmement surestimés ”. De son côté M. Rosen fixe la limite supérieure à 25 000 morts. Toujours sans aucune donnée objective.
La bagarre n’est pas finie, deux jours plus tard la limite est descendue à 10 000 morts et pour D.Beninson au plus à 5 100, bien qu’il ne dispose d’aucun élément scientifique pour l’affirmer. Mais M. Beninson est Président de
Depuis cette Conférence internationale, “ l’annexe
Au cours des mois suivants, les rotatives des publications officielles relayées par la presse se mettent en action : dans une publication de
Le 8 octobre 1986, Le Monde écrit : « L’accident de Tchernobyl a renforcé l’audience et la crédibilité de l’AIEA », et souligne […] « Dans les jours qui ont suivi l’accident de la centrale ukrainienne, l’AIEA – par l’intermédiaire de son directeur général – a clairement montré sa volonté de maîtriser la situation. […] Il ne fait nul doute que l’accent sera désormais mis, plus encore qu’auparavant, sur toutes les activités relatives à la sûreté nucléaire. ”. L’OMS du coup est hors jeu. Soumise.
La jonglerie des chiffres, amorcée à Vienne sans aucune preuve scientifique, s’accentue. Pour être crédible et aboutir au même résultat, la révision à la baisse doit venir des experts soviétiques eux-mêmes.
Pour les faire plier et les faire collaborer afin de rendre le mensonge acceptable, il aura fallu cinq ans, de 1986 à 1991. Cela s’est fait par étapes, non sans difficultés, parallèlement à la perestroïka et à la dissolution de l’URSS, jusqu’à la publication de l’expertise internationale dirigée par l’AIEA « Projet international Tchernobyl », dont le rapport final, présenté à Vienne en mai 1991, affirmera que les rayonnements n’ont aucun effet sur la santé de la population.
En mai 1987, lors d’une conférence organisée par l’OMS à Copenhague (WHO, 13-14 May 1987), A.Moïsseev affirme, toujours dans l’abstraction, qu’une “ tendance positive de la situation radiologique ” permet de réduire la dose collective externe d’un facteur 1,45 et la dose collective interne d’un facteur compris entre 7 et 10,5 par rapport à l’estimation initiale.
En septembre
D’après le rapport Iline-Pavlovsky on ne relève aucune augmentation de morbidité chez les enfants, il n’y a pas de différence entre régions contaminées et régions témoins et pour la première fois il est fait mention du syndrome de “ radiophobie ” chez les habitants des zones contaminées pour expliquer la morbidité croissante.
Pour finir, on relève un grossier maquillage des chiffres dans ce rapport : la dose efficace est estimée sur 70 ans pour toute la population de l’URSS (278 millions d’habitants), alors que les habitants contaminés de la seule partie européenne de l’URSS, pris en compte dans “ l’annexe
Avril 1988. À la conférence de Sydney, L.Iline réévalue un peu la dose qu’il a précédemment divisée par 18. Mais, à l’Assemblée Générale de la même année, UNSCEAR décide de faire la “ moyenne ” des deux estimations d’Iline et réduit la dose présentée par Légassov dans “ l’annexe 7 ” en 1986, en la divisant par 9. Deux ans après Vienne, “ Beninson peut être satisfait ” – conclut B.Belbéoch et ajoute : “ Iline et Pavlovsky étaient signataires de l’annexe 7. C’est donc d’une véritable autocritique qu’il s’agit. ” Ou d'une cynique distribution des rôles? Quatre jours après la communication de L.Iline à la conférence de Sydney, le professeur V.Légassov s’est suicidé, le 26 avril, jour du deuxième anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl.
En septembre 1988, pour éviter les évacuations massives trop coûteuses, le conseil des ministres d’URSS statue sur le critère de “ résidence sans danger ” ou de “ vie sûre ”, en adoptant la théorie inventée par L.Iline de “ 35 rem en 70 ans ”. Cette mesure a soulevé la contestation d’un groupe de scientifiques biélorusses de l’Académie des sciences. Au lieu des 35 rem ils ont exigé 7 rem en 70 ans, ce qui correspondait à la recommandation internationale formulée par
Mars 1989. Les désaccords entre les experts moscovites et les scientifiques biélorusses – entre le pouvoir central et les académiciens soutenus par l’opinion publique - sont apparus lors des débats de mars 1989 au soviet de Biélorussie, en pleine campagne électorale pour le premier Soviet des députés des peuples de l’URSS qui sera élu démocratiquement le 26 mars 1989.
Juin 1989. Pour colmater la brèche ouverte par les académiciens biélorusses, trois membres de l’OMS, toujours les mêmes, seront dépêchés en juin à l’Académies des sciences de Minsk : P.Waight, directeur du groupe de radioprotection du secrétariat de l'OMS, Dan Beninson, président de
“ Les scientifiques insuffisamment compétents dans le domaine des effets des radiations assimilent l’ensemble des différentes perturbations biologiques et médicales observées au seul effet des radiations. Ces perturbations ne peuvent pas être causées par l’action du rayonnement ionisant…” (OMS, 1989). L’immunité juridique des “ experts ” de l’OMS et de
Cependant la fronde inquiète le pouvoir, tant à Moscou qu’à Vienne. Il faut réussir à la délégitimer par les scientifiques soviétiques eux-mêmes.
Le 14 septembre 1989, un groupe de 92 “ scientifiques travaillant dans les domaines de la médecine et de la protection radiologique en rapport avec la situation créée par l’accident de Tchernobyl ” adresse une lettre collective à Mikhail Gorbatchev. Parmi les signataires il y a L.Iline bien sûr, mais aussi S.Yarmonenko en tête de liste, A. Gouskova, M.Savkine, l’ukrainien V.Bebéchko et d’autres. 12 ans plus tard, en juin 2001 nous les filmerons à
Le 26 mai 1989, ouverture de la session du Congrès des députés de l’URSS.
Le Congrès institue une Commission pour l’analyse des causes de l’accident de la centrale de Tchernobyl et des responsabilités du pouvoir exécutif dans l’absence de mesures de protection efficaces pendant la période post-accidentelle. Un groupe permanent d’experts, rebelles à la ligne autoritaire antiscientifique de Moscou, comprenant 200 spécialistes représentant différentes branches scientifiques et techniques des trois républiques victimes de la catastrophe, travaille au sein de cette Commission. Une vingtaine de députés font partie du groupe d’experts dont, Youri Chtcherbak, Alla Yarochinskaya, l’écrivain Ales Adamovitch qui soutiendra avec Andrei Sakharov la création de l’Institut indépendant “ Belrad ” de l’académicien Vassili Nesterenko. Celui-ci dirigera les travaux de
Le début des années 90 correspond à la brève période de “ printemps démocratique ” introduit par
Mais, la recherche de la vérité, n’a pas cessé depuis alors. Elle continue encore aujourd’hui dans les catacombes. Le livre
En octobre 1989, les nucléocrates soviétiques demandent une fois de plus l’aide aux collègues occidentaux. Pour se relégitimer devant la société civile qui proteste à travers ses députés, le Kremlin demande à l’AIEA une expertise internationale d’évaluation des conséquences de l’accident et de l’efficacité des contre-mesures prises par les autorités. Depuis la discussion à huis clos en août 1986 à Vienne, où l’Annexe 7 de Légassov a été jetée au panier, le pouvoir central soviétique est rentré dans les rangs, il a maté les voix scientifiques discordantes avec les "92" signataires de la lettre à Gorbatchev et il demande maintenant qu’on renvoie l’ascenseur. L’AIEA crée un Comité de consultation internationale, “ Projet international Tchernobyl ”, présidé par le docteur Itzuro Shigematsu, représentant du RERF – Fondation de recherche des effets radiologiques à Hiroshima, - une organisation financée par les gouvernements américain et japonais qui étudie les conséquences de l’irradiation chez les victimes des bombardements atomiques au Japon. Conformément au plan approuvé par le Comité de consultation internationale, de mars 1990 à janvier 1991, une cinquantaine de missions visitent l’URSS, auxquelles participent, outre les Soviétiques, 200 experts de 25 pays représentant entre autres l’AIEA, l’UNSCEAR, l’OMS,
C’est le crime de haute trahison des agences de l’ONU et des États qu’elles cautionnent, dont la publication du professeur Alexey V. Yablokov constitue le réquisitoire et la pièce à conviction scientifique.
Une fois la dyarchie de la guerre froide disparue et les ministères de la santé soviétiques et post-soviétiques soumis, le lobby atomique occidental victorieux reste seul maître du monde atomique. Mais sa solitude n'est pas sereine : le 20 février 2008, Le Monde titrait La France se prépare aux conséquences d'un accident de type Tchernobyl sur son sol. Sera-t-elle à la hauteur? La presse internationale aura l'occasion de poser la question aux professeurs V.Nesterenko, R.Gontcharova et A.Yablokov présents, le 27 avril à Genève, à l'inauguration officielle de l'exposition en hommage au sacrifice des "liquidateurs", qui ont sauvé l'Europe.
Wladimir Tchertkoff, secrétaire adjoint
de « Enfants de Tchernobyl Bélarus »
Auteur de « Le crime de Tchernobyl », Actes Sud, 2006
1 Article du 1er mai 1986 dans le journal Ecologie.
2 Une partie de la chronologie de l’assujettissement de la science aux autorités nucléaires occidentales est tirée de l’article de B.Belbéoch“ Responsabilités occidentales dans les conséquences sanitaires de la catastrophe de Tchernobyl en Biélorussie, Ukraine et Russie ”. « Radioprotection et Droit Nucléaire » Ed.Georg, 1998, p.247-261
* “Le crime de Tchernobyl – Le goulag nucléaire”, W.Tchertkoff – Actes Sud, 2006
1 commentaire:
il en est où ce film?
je viens de tomber sur le site
j'aimerais raconté le voyage touristique de jeunes hommes dans cette zone en BD
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