jeudi 5 juin 2008

Déroulé du programme Vivre Tchernobyl

Mémo Vivre Tchernobyl


L’accident nucléaire de Tchernobyl de 1986 est considéré comme la plus grande catastrophe technoscientifique de tous les temps : le « nuage » a fait plusieurs fois le tour de la planète en propageant les radionucléides dans de nombreuses régions du monde ; au Belarus, en Ukraine et en Russie 10 millions de personnes vivent encore aujourd’hui en territoire contaminé ; la France comme une grande partie de l’Europe n’a pas été épargnée : l’Alsace, le Sud-est et la Corse ont été touchés durablement. De plus la catastrophe de Tchernobyl n’est pas un événement appartenant au passé, circonscrit dans le temps ; en Ukraine on dit qu’elle est « un arbre qui pousse » : les effets et conséquences sanitaires s’amplifiant au fil du temps, cette catastrophe, inédite par son ampleur et son étendue dans l’espace et le temps, nous a appris qu’un accident local peut avoir des conséquences globales engageant l’avenir de tous.

Tchernobyl s’impose comme le signal permanent d’un devenir possible de l’environnement et de l’humanité.

Le conseil régional Rhône-Alpes se propose d’organiser à l’ENS-sciences les 15 et 16 mai 2008 un événement culturel public, Vivre Tchernobyl, ayant pour vocation de fournir à toutes et tous des éléments de réflexions et de connaissances sur la question du nucléaire qui s’impose en toute légitimité dans le pays le plus nucléarisé du monde. Pour étayer cette réflexion publique nous proposons un cycle de conférences et de débats sur deux jours en faisant intervenir des témoins directs, des scientifiques, des médecins, des journalistes, des représentants d’ONG et d’associations, des sociologues, des écrivains, des artistes et des philosophes. Au fil des interventions nous reviendrons sur la catastrophe de Tchernobyl et ses conséquences sanitaires, sociales et politiques ; nous considérerons les différents types d’actions émanant de la société civile ; nous traiterons du travail collectif de mémoire et de la constitution d’une culture post-catastrophique ; nous prolongerons enfin notre réflexion sur le devenir et la métamorphose des sociétés technoscientifiques. Parallèlement aux conférences nous organisons une exposition des photographies de Guillaume Herbaut qui a réalisé une série de portraits de familles au Belarus intitulée Tchernobylsty ainsi que la série de peintures, Sarkophagos, de Christophe Bisson qui se déploie autour de l’image iconique du sarcophage de Tchernobyl. Par ailleurs nous accueillerons dans le hall du lieu de conférence des associations qui présenteront leur action au public.

Déroulé du programme Vivre Tchernobyl


Jeudi 15 mai

9h00 Discours d’ouverture

9h30 Bilan sanitaire de la catastrophe de Tchernobyl

Intervenants : -Rose Goncharova (Belarus) Professeur à la tête du laboratoire de Sureté génétique à L’Institut de Génétique et de Cytologie à l’académie nationale des sciences du Belarus.

-Vassili Nesterenko (Belarus), physicien, ex-directeur de l'Institut de l'énergie nucléaire de l'Académie des sciences de Biélorussie qui travaille sur les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl. Depuis 1990, il est directeur de l'institut indépendant biélorusse de protection radiologique « Belrad » qu'il a créé en 1989.

-Youri Bandajhevsky (Belarus), spécialiste d’anatomie pathologique, ex recteur de l’institut étatique de Gomel.

-Michel Fernex (suisse) Professeur émérite, Faculté de Médecine de Bâle, ex-membre de Comités Directeurs de TDR (Programme spécial de Recherche pour les Maladies Tropicales), médecin retraité de l’OMS.

- Angelina Nyagu (Ukraine) Docteur au centre de médecine radiologique de Kiev et présidente de l’association Les médecins de Tchernobyl.

- Alison Katz Sociologue et psychologue ayant travaillé pendant 18 ans à l’OMS, membre du People’s Health Movement.

-Alexey Yablokov (Russie), représentant Vert de Russie,
Membre de l’académie des sciences de Russie, représentant vert de la Russie.

Modératrice: Galia Ackerman (France): Spécialiste du monde russe et postsoviétique, est journaliste à Radio France Internationale, essayiste et traductrice. Historienne de formation, elle a été commissaire de la grande exposition "Il était une fois Tchernobyl", présentée au Centre de culture contemporaine de Barcelone de mai à octobre 2006. Elle est l’auteur de Tchernobyl, retour sur un désastre, 2006.


Timing: 2h00
14h00 L’action des ONG et des associations humanitaires.
En France comme dans les Républiques d’ex-URSS les plus touchées par les retombées radioactives, la catastrophe de Tchernobyl a révélé les insuffisances d’une gestion centralisée de l’accident et de ses conséquences, et les limites des expertises et des recommandations institutionnelles. Dès 1986, la société civile s’est organisée pour contrôler l’environnement et informer les populations des risques encourus, mais aussi pour venir en aide aux habitants des territoires contaminés, et notamment aux enfants qui sont les plus vulnérables. De l’expertise indépendante ou citoyenne à l’action humanitaire, l’engagement associatif a pris de multiples formes depuis 20 ans. Chacun des participants à cette table ronde, porteur d’un témoignage et d’une expérience uniques, sera invité à s’exprimer sur les enjeux, mais aussi les limites, de la mobilisation citoyenne et de l’action des ONG, aussi bien après qu’avant la catastrophe.
Intervenants: - Jean-Claude Autret, (France), ex-président et membre de l’ACRO (Association pour le Contrôle de la Radioactivité dans l’Ouest). Dotée d'un laboratoire financé par le soutien des adhérents et la vente d'analyses, l'ACRO effectue des mesures de radioactivité gamma et bêta, ainsi que des mesures de radon. L'ACRO siège aussi dans de nombreuses commissions officielles et est impliquée depuis plusieurs années en Biélorussie où elle travaille avec les populations des territoires contaminés et les ONG locales.
-Tatiana Kotlobaï (Biélorussie), représentante de Pousse de vie, association indépendante biélorusse intervenant auprès des populations en zone contaminée dans le district de Braguine, un des territoires les plus touchés par les retombées radioactives et les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl.
- Roland Desbordes (France). CRIIRAD. Alors que les services officiels indiquent que la France, en raison de son éloignement, a été totalement épargnée par le nuage radioactif de Tchernobyl, des familles entières consomment, sans le savoir, du lait, du fromage, des légumes frais... gorgés de produits radioactifs. C’est en réaction au manque de prise en considération des conséquences de cet accident pour l'environnement et l'être humain que la CRIIRAD s'est constituée.
-Maryvonne David-Jougneau (France). Ex-Comité Bandajesky. Agrégée de philosophie et docteur en sociologie, elle est l’auteur de nombreuses publications, dont le dissident et l’institution, ou Alice au pays des normes et Antigone ou l’aube de la dissidence et a cosigné avec B.Doray la descente aux enfers du professeur Bandajevsky dzns le revue Sud/Nord.
-Vladimir Tchertoff (Suisse), journaliste et auteur de films documentaires, vice président de l’association Les enfants de Tchernobyl.
-Denis Fauconnier (France), Médecin ayant établi un rapport sur les effets du passage de Tchernobyl en Corse.
Modérateurs : Hélène Blanchard, Vice présidente de la Région Rhône-Alpes, déléguée à l’environnement et à la prévention des risques.
Guillaume Grandazzi (France). Sociologue, il travaille depuis une dizaine d’années sur les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl et a codirigé le livre Les silences de Tchernobyl. L’avenir contaminé (Autrement, 2004, 2006). Dans le cadre de plusieurs projets, il a réalisé une quinzaine de missions dans les territoires contaminés de Biélorussie.
Timing : 2h00

17h00 Projection du film White Horse de C.Bisson et M. De Leo

Nous suivons Maxime de retour dans sa ville natale, Pripyat, Ukraine, la ville fantôme aux abords de Tchernobyl d’où lui et sa famille ont été évacués juste après la catastrophe nucléaire en avril 1986. Nous traversons un no man’s land, la zone d’exclusion, avant d’arriver à son ancien appartement. A travers les traces évanescentes subsistant dans l’espace vide, Maxime se souvient de son enfance perdue.




Vendredi 16 mai

10h00 Quel devenir pour les sociétés technoscientifiques?

L’homme doit-il assumer silencieusement son devenir-technologique comme un destin et se résoudre à la fatalité, ou peut-il encore espérer peser sur le cours de l’histoire en refusant la perspective de la catastrophe ? Le choix du nucléaire, pris entre la mauvaise conscience que rappelle la mémoire de Tchernobyl et sa supposée nécessité face au risque de réchauffement climatique, pose avec force la question de notre responsabilité dans le devenir probable de l’humanité. Cette question, qui s’annonce comme étant l’une des plus importantes du siècle qui commence, ne peut être abordée que de manière complexe et pluridisciplinaire, c’est la raison pour laquelle cette table ronde réunira des spécialistes mondiaux francophones, tant d’un point de vue philosophique et anthropologique que de celui des connaissances techniques et empiriques.

Intervenants : -Mycle Schneider (France) est consultant international en énergie et politique nucléaire. Entre 1983 et avril 2003, Mycle Schneider était directeur de l’agence d’information spécialisée sur l’énergie WISE-Paris et rédacteur en chef de ses publications, en particulier du projet Internet Investigation Plutonium (www.pu-investigation.org). Depuis 2007, il est membre du International Panel on Fissile Materials (IPFM), basé à l’Université de Princeton (www.fissilematerials.org). En 2006-2007, il a fait partie d’un consortium de consultants chargé d’analyser l’organisation des fonds de démantèlement et de gestion des déchets pour le compte de la Commission Européenne. En 2005, il a été conseillé le Committee on Radioactive Waste Management (CoRWM) au Royaume Uni sur des questions de sécurité nucléaire.
-Jean-Philippe Desbordes (France): Journaliste, conseiller éditorial aux Editions Actes Sud et chargé de cours au pôle audiovisuel Charles Cros (Université Marne la Vallée), auteur de Atomic Park.
- Alain Gras (France) est un des principaux penseurs de la technique en France, professeur de socio-anthropologie des techniques à Paris.
- Karpan Mykola (Ukraine) Physicien. Membre du comité ukrainien de régulation nucléaire. En 1986, il travaillait en tant qu’ingénieur en chef à la centrale de Tchernobyl. Le 26 avril 1986 il a participé sur place à la localisation de l’accident.

Modérateur : Frederick Lemarchand (France). Socio-anthropologue à l’Université de Caen Basse-Normandie, coresponsable des Silences de Tchernobyl (Autrement), travaille depuis dix ans sur les conséquences anthropologiques de la catastrophe, conseiller scientifique de l’exposition Une histoire de Tchernobyl (Barcelone), auteur d’une douzaine d’ouvrages collectifs et directeur de deux Universités européennes d’été consacrées à Tchernobyl.

14h00 Tchernobyl: culture et héritage
Près d'un quart de siècle après la catastrophe de Tchernobyl qui continue à hanter les esprits à l'échelle planétaire, celle-ci est devenue un objet de représentation. Comment les artistes voient-ils la catastrophe et ses conséquences? Comment préserve-t-on la mémoire de cette catastrophe? Que cherche-t-on à montrer dans des expositions temporaires et permanentes? Comment sauve-t-on un héritage culturel dans des régions détruites par la catastrophe? La zone interdite, devient-elle une décharge ou un lieu de mémoire? Telles sont les questions qui seront débattues par des spécialistes de renom, ukrainiens et français, lors de ce panel animé par Galia Ackerman, historienne de Tchernobyl et commissaire de la plus grande exposition consacrée à Tchernobyl.

Speakers : Rostislav Omeliashko (Ukraine), directeur du Centre scientifique d'Etat à la conservation de l'héritage culturel des suites de catastrophes industrielles, auprès du Ministère des Situations d'Urgence d'Ukraine.

Alexander Sirota (Ukraine) Rédacteur en chef du site internet pripyat.com.

Ada Ackerman (France), enseignante en histoire de l'art à l'Université de Paris-X (Nanterre) qui a fait la première étude sur l'art issu de Tchernobyl

Sergii Mirnyi (Ukraine), chercheur et conseiller scientifique au Musée Tchernobyl à Kiev, ancien liquidateur.

Modératrice: Galia Ackerman (France): Spécialiste du monde russe et postsoviétique, est journaliste à Radio France Internationale, essayiste et traductrice. Historienne de formation, elle a été commissaire de la grande exposition "Il était une fois Tchernobyl", présentée au Centre de culture contemporaine de Barcelone de mai à octobre 2006. Elle est l’auteur de Tchernobyl, retour sur un désastre, 2006.


Timing : 2h00


16h30 Autour de la Supplication de Svétlana Alexiévitch

Rencontre-débat avec Svetlana Alexievitch (Belarus)

Svetlana Alexievitch, née le 31 mai 1947, est écrivain et journaliste biélorusse, dissidente soutenue par le PEN club et la fondation Soros.
Elle a reçu de nombreux prix prestigieux pour son roman La Supplication - Tchernobyl, chronique du monde après l'apocalypse (1997).

Lecture de textes.

Modérateur: Bruno Boussagol (France), metteur en scène ayant adapté au théâtre La supplication.


Timing: 1h30


18h30 Projection du film Un voyage de Christophe Bisson
Nous suivons un groupe d'ukrainiens composé de liquidateurs, d'anciens résidents de Pripyat et de simples visiteurs, tous se rendant sur les lieux de la catastrophe de Tchernobyl. Pour certains il s'agit de revoir leur ancien appartement où ils ont tout laissé il y a maintenant 22 ans, pour d'autres, les vétérans de "la guerre contre l'atome", de retourner sur "le champ de bataille", enfin pour ceux qui n'ont pas de liens directs avec la catastrophe, d'aller voir ce qu'ils n'ont fait qu'imaginer jusqu'à lors.
Retour vers le passé? Ou bien même confrontation à ce qu'on ne comprend pas, à ce qui nous dépasse?




Exposition artistique Vivre Tchernobyl




Guillaume Herbaut : Membre fondateur du collectif de photographes « l’œil public », il a construit depuis de nombreuses années son travail autour de reportages socio-politiques. Il présentera des photos des séries Tchernobylsty et Slavoutich.

« Pour Tchernobylsty, le lieu de la photo, c’était le lieu où l’on se rencontrait, où on parlait. Je voulais faire des photos de famille basiques, comme n’importe qui peut en faire. Pour le couple où l’on voit l’homme avec les jambes en moins, on a fait l’entretien dans la cuisine, j’ai fait une première photo.Après, j’ai essayé d’en faire une ailleurs, mais ça n’a pas marché, ça marchait là où on avait parlé. Ca marchait bien dans ces lieux, parce que l’on parlait une heure, deux heures et il y avait une grande intensité, et si l’on changeait de pièce, on cassait cette intensité. Et puis l’histoire des canapés, ça marchait bien. »
Tchernobylsty


Christophe Bisson : peintre français ayant une formation de philosophe, il a réalisé une série intitulée Sarkophagos à partir d’une image unique du sarcophage de Tchernobyl qu’il a déclinée à la manière des Cathédrales de Claude Monet. Le motif, en se répétant de manière obsessionnelle, disparaît, se « spectralise » dans une matière épaisse et minérale faite de cendres, de fibres végétales et de peinture à l’huile. L’image, ne semblant jamais pouvoir se fixer dans une représentation stabilisée, se dérobe, fuit l’identification, et retourne à la matière d’avant la forme dans un mouvement d’effondrement suspendu.

« Quand je me suis retrouvé devant le Sarcophage de Tchernobyl j’ai éprouvé la forte impression que la chose qui se dressait là, devant moi, que je pouvais presque toucher, excédait quasi-infiniment ma capacité de voir.
Comment appréhender ce qui dépasse toute mesure ? Comment ne pas se laisser fasciner, jusqu’à l’extinction de soi, par l’invisibilité du Mal ?
Derrière ce bloc d’évidence, clairement délimité, aux arêtes bien découpées, la face sans visage de Méduse m’évidait le regard »



Sarkophagos
Lecture d’extraits de La supplication de Svetlana Alexievitch en présence de l’auteur

Entretien dans le cadre des conférences avec l’auteur Belarusse par le metteur en scène Bruno Boussagol.

Svetlana Alexievitch, née le 31 mai 1947, est écrivain et journaliste biélorusse, dissidente soutenue par le PEN club et la fondation Soros.
Elle a reçu de nombreux prix prestigieux pour son roman La Supplication - Tchernobyl, chronique du monde après l'apocalypse (1997).

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